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Perspectives 2019

Comment le gâchis de la taxe sur le carbone nous distrait de solutions climatiques réalistes

Stewart Muir est le fondateur et Directeur général de Resource Works Society, une organisation établie à Vancouver.

LES TAXES SUR LE CARBONE SONT EN VOIE DE DEVENIR UNE QUESTION IMPORTANTE LORS DES ÉLECTIONS FÉDÉRALES DE 2019 AU CANADA. L’APPUI EST LARGEMENT DIVISÉ LE LONG DE LIGNES PARTISANES.

Il est facile de voir pourquoi les défenseurs de la tarification du carbone se sentent frustrés actuellement. Il faut travailler dur pour proposer des taxes sur le carbone mais il est facile de s’y opposer. Est-il fréquent que les gens votent pour s’imposer à eux-mêmes une nouvelle taxe? Dans l’État de Washington, les architectes d’une taxe sur le carbone figurant sur le bulletin de vote en novembre 2018 ont appris de déceptions antérieures que la polarisation partisane pouvait ruiner une initiative. Ils se sont donc donné beaucoup de peine pour mettre au point ce qu’ils croyaient être une approche dépolitisée. Peine perdue : les électeurs n’étaient pas intéressés et ont encore une fois décidé de tourner le dos à une taxe sur le carbone.

Il serait facile d’identifier la polarisation idéologique comme étant la cause du problème, en se basant sur les stéréotypes populaires des fanatiques du climat et des négateurs. Pourtant, si on y regarde de plus près, la réalité est très différente. La compréhension de cette réalité est la clé de l’élaboration d’une stratégie qui permettra d’aller de l’avant et d’assurer le succès d’une politique climatique pour le Canada.

L’IDÉE DE LA TARIFICATION DU CARBONE EST INSPIRÉE DU MODÈLE DE LA TAXE SUR LE TABAC ET LES ALCOOLS, ET C’EST LÀ QU’EST LE PROBLÈME

L’idée de la tarification du carbone est inspirée du modèle de la taxe sur le tabac et les alcools, et c’est là qu’est le problème. Prenons le tabac. Entre 1982 et 1992, le gouvernement canadien a augmenté les taxes sur le tabac de 500 pour cent, ce qui a entraîné un déclin de 40 pour cent de la consommation de cigarettes par habitant. Excellent résultat. L’idée est que si vous voulez que les consommateurs se comportent d’une certaine manière, taxez le comportement indésirable et récompensez le comportement désiré. Le problème avec la pénalisation des émissions de carbone, toutefois, c’est que bien que le carbone soit une substance qui a des inconvénients évidents, il se trouve également qu’il est un sous-produit de la substance la plus positive et la plus transformatrice de l’histoire de la civilisation humaine : l’hydrocarbure. Le tabac n’a pas créé les conditions nécessaires pour l’éradication de maladies, la quasi-élimination de la faim et de la mortalité infantile ou des panneaux solaires à faible prix. Les hydrocarbures, oui. Arrêter de fumer résout le problème des taxes pour un fumeur mais, en particulier pour les résidents des banlieues ou des régions rurales qui doivent compter sur des véhicules à moteur à combustion interne fiables et abordables, la tarification du carbone n’est qu’un autre fardeau qu’ils ne peuvent éviter.

Bien que je fasse cette observation, je ne suis pas de ceux qui haïssent toute taxe sur le carbone. Il y a une douzaine d’années, j’étais aux premières loges lorsque la Colombie-Britannique a mis au point sa taxe carbone innovatrice. À l’époque, ce semblait être la direction à prendre. Les mordus de politique ont découvert dans la neutralité fiscale un moyen astucieux d’amenuiser les aspects négatifs d’une taxe punitive. À cette époque innocente, avant que nous ayons tous disparus dans le labyrinthe de l’évasion fiscale et de l’abattement fiscal, cela semblait évident.

La stratégie britanno-colombienne a obtenu de nombreuses accolades à ses débuts. À long terme, toutefois, je vois mal quel bénéfice la province a retiré de son approche, et dont elle n’aurait pas profité autrement. L’innovation dans le secteur de l’automobile a permis de réaliser des gains importants d’économie de carburant, 20 pour cent ou plus dans la plupart des cas, ce qui a entraîné la réduction de la pollution causée par les véhicules. Pourtant, en 10 ans la consommation d’essence et de diesel par habitant en C.-B. a augmenté plutôt que de diminuer. En 2007, avant l’adoption de la taxe, on vendait des nombres égaux de berlines/bicorps et de camions/VUS. À l’été 2018, les acheteurs de voitures neuves de C.-B. ont acheté 2,7 camionnettes/VUS pour chaque voiture. En fin de compte, rien n’a changé. Les consommateurs ont profité des améliorations de la technologie et de la consommation de carburant pour acheter les véhicules plus gros et plus puissants qu’ils préféraient.

Pendant que les experts en modélisation continuent à remanier leurs équations et insistent que ce sont eux qui savent, j’incline à apprendre de l’expérience en abordant le problème du changement climatique d’un angle plus pratique que celui de la tarification du carbone. Je ne dis pas que nous devrions nécessairement abandonner les taxes sur le carbone. Ce que nous devons faire c’est parvenir à une meilleure compréhension de ce que la technologie peut accomplir, tout en outrepassant quelques tabous culturels à propos de l’énergie.

Il est temps de dépasser les attaques contre les hydrocarbures. Recherchez les termes « carburant fossile », « pétrole », « brut » ou « hydrocarbures » dans le texte de l’Accord de Paris sur le climat. Vous ne les y trouverez pas. L’Accord démontre que l’avenir de l’énergie occupe un vaste territoire et n’est pas confiné à un étroit ensemble de spécifications déterminé par divers groupes d’analystes qui tentent de prendre possession du mandat sur le changement climatique. Un appel à l’action réaliste pour le 21e siècle exige que nous commencions avec quatre principes de base.

En premier lieu, nous devons commencer à penser mondialement, pas localement. Les émissions de la Chine nous affectent tous et pourtant jusqu’à présent des pays comme le Canada ont refusé d’ajuster leur approche en tenant compte de ce facteur. Deuxièmement, il est temps de mettre au rebut les attitudes déterministes envers la connaissance et l’innovation qui nous empêchent d’avancer et qui nuisent à la qualité de la discussion. Lorsque les partisans les plus véhéments de certaines solutions énergétiques que tous devraient adopter selon eux se trouvent également être les représentants en vente de ces mêmes solutions, un scepticisme prudent est de mise. Actuellement, cela fait pourtant défaut. Troisièmement, comme la Colombie-Britannique nous l’a appris, il est nécessaire de voir les choses de la manière dont elles sont perçues par les consommateurs/électeurs/mères qui, à la recherche du meilleur résultat pour eux-mêmes, feront les choix qui leur conviennent. Finalement, ne cessons jamais d’éduquer et d’informer, parce que c’est là la clé ultime du progrès.

Ces quatre principes sont à la fois locaux et universels.

Pour les mettre en œuvre, j’ai proposé une douzaine de mesures concrètes qui seront beaucoup plus efficaces que la valse de la taxe sur le carbone. Celles-ci incluent d’obtenir de la Chine autant de gaz naturel que nous le pouvons, aussi rapidement que possible, sous forme de GNL. On réduira ainsi les émissions en Chine, tout en assurant que la portion la plus innovatrice de l’industrie canadienne, le secteur pétrolier et gazier, continue à réaliser des percées dans la récupération des hydrocarbures avec le moins d’effets secondaires indésirables possible. L’expertise accumulée à la fine pointe du forage et de l’extraction est également la clé du futur succès de solutions énergétiques comme l’énergie géothermique et l’hydrogène. On peut être épris de panneaux solaires tout en poursuivant simultanément l’objectif d’un baril de pétrole zéro carbone, un objectif réel qu’ on vise actuellement dans notre secteur de l’énergie. Le financement d’une supergrappe d’innovation fédérale consacrée à cet objectif représente une mesure concrète.

Le recours à la longue histoire d’innovation dans l’énergie atomique du Canada, associée à nos abondants dépôts d’uranium, constitue une autre stratégie de décarbonisation réaliste que les politiciens doivent trouver un moyen d’adopter.

Sur le plan des connaissances, l’information sur l’énergie n’est pas diffusée très efficacement à l’heure actuelle et ce n’est pas seulement parce que la plupart des gens ont peur des mathématiques. La guerre culturelle sur les campus universitaires ne concerne pas que les pronoms et la Palestine : elle a également comme effet de détériorer notre discours sur l’énergie. L’investissement dans des programmes et le leadership éclairé dans les trajectoires culturelles de l’évolution énergétique devraient être reconnus comme une priorité, de pair avec l’ingénierie et la géophysique. 

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